L'ancien réseau de routes nationales (1824-1933)[]
- A la Restauration, la France retrouva approximativement ses frontières de 1791. Ainsi, les territoires annexés par la France après la Révolution et sous l’Empire retrouvèrent leur souveraineté étrangère.
- Par conséquent, un certain nombre de routes impériales se retrouvèrent amputées d’une partie de leur tracé ou intégralement hors du territoire national après 1815. Avec 181 routes ou sections de routes intégrées au nouveau Royaume de France, la liste établie sous l'Empire se mit alors à présenter des lacunes, particulièrement aux alentours des numéros 60 et 70 et après 200 pour les routes italiennes.
- Au début des années 1820, deux classements furent opérés : le premier, daté du 6 juillet 1820, classe un grand nombre de routes départementales de Seine-et-Oise pour former 8 nouvelles routes royales (sans numéro) tandis que le second, daté du 10 février 1821 classe suivant le système impérial une route royale 75Bis (la première à porter officiellement un numéro "Bis").
- Il fallut cependant attendre une circulaire du 10 juillet 1824 pour que soit repensé le système de numérotation des routes royales. On attribua alors de nouveaux numéros aux routes en compactant l’ancienne nomenclature et en respectant dans les grandes lignes l’ordre de classification et de numérotation antérieur, hormis quelques réorganisations dans le Nord-Est afin de préserver le zonage géographique dans un espace plus restreint.
- Cette nouvelle nomenclature donna naissance au système connu jusque dans les années 1970 pour les petits numéros et dont plusieurs vestiges subsistent actuellement.
Circulaire du 10 juillet 1824 |
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Nouveau numérotage des Routes royales.
Paris, le 10 Juillet 1824. Le Directeur général des ponts et chaussées et des mines (M. Becquey), Aux Préfets (Ampliations pour les ingénieurs). Le tableau annexé au décret du 16 décembre 1811, offre un assez grand nombre de communications qui ne font plus partie du territoire de la France, et dont la radiation sur ce tableau laisserait des lacunes dans la succession des numéros sous lesquels les routes sont actuellement désignées. Au moment de publier une statistique des routes royales, j'ai pensé qu'il était convenable de faire disparaître ces lacunes, et, en effaçant les routes qui se trouvent hors des limites du royaume, d'établir un nouvel ordre successif de numéros pour celles qui appartiennent au système actuel de nos communications. Tel est l'objet du tableau ci-joint que le ministre de l'intérieur a revêtu de son approbation. La division des routes en trois classes n'y est point modifiée : chacune de ces classes conserve les communications qui lui sont attribuées par le décret de 1811. Seulement, les numéros ont été changés, et l'on a intercalé les routes et portions de routes départementales, que des décisions ou des ordonnances, postérieures au décret du 16 décembre 1811, ont élevées au rang de routes royales. La route royale de 1.re classe, qui a porté jusqu'à présent le n.°3, a été rayée. Projetée dans un intérêt militaire, la plus grande partie de son développement s'étendait sur le territoire des Pays-Bas : elle se rattachait en France à des communications déjà anciennes; la portion qui n'appartenait à aucune de ces communications n'a jamais été ouverte et serait aujourd'hui sans objet. Vous remarquerez que, dans le tableau, l'ancien numéro de chaque route est placé en regard du nouveau. Ce rapprochement sera nécessaire pendant quelque temps, pour prévenir les erreurs, et, dans notre correspondance, il sera indispensable d'énoncer toujours les deux numéros (en mettant l'ancien entre parenthèses), jusqu'à ce que les habitudes soient bien prises, et qu'il n'y ait plus lieu à confusion. Je vous prie de tenir bien exactement la main à cette disposition, sans laquelle nous pourrions être exposés à des méprises, qu'il importe de prévenir. |
Plaque de cocher datée de 1824 (Mention Route Royale 57) à Besançon (25), quartier de St Claude. © Lloyd_cf
- La liste passa donc officiellement après 1824 de 229 à 191 numéros, auxquels il faut rajouter trois axes prévus en Corse mais non numérotés. La RN192 est classée le 31 janvier 1827. Cette même année, de nouvelles routes s'insèrent dans la nomenclature avec des numéros "Bis". Le 14 mai 1837 sont classées 5 routes en Corse, y compris les trois prévues en 1824, ce qui porte la nomenclature à 202 routes (en comptant les numéros "Bis"), plus les divers embranchements mentionnées en 1811 et en 1824. Le 26 juillet 1839 et le 16 juin 1856, trois nouvelles routes corses portent la nomenclature au numéro 200.
- La Restauration puis la Monarchie de Juillet ont ainsi contribué à accroître significativement le réseau routier national. Il faut ajouter à la nomenclature des routes nationales celle des routes stratégiques de l'Ouest de la France créées en 1833 avec un statut particulier pour des motifs militaires.
Route Impériale 64 sous le second Empire
FMalard.
- Le Second Empire complète à son tour le tableau lors de l'intégration de la Savoie et du Comté de Nice à la France : les 18 et 31 août 1860, 6 routes impériales sont ajoutées et 4 autres routes existantes sont prolongées. Le 10 juillet 1862, les routes stratégiques sont réparties en de nouvelles routes impériales et départementales. La nomenclature est ainsi modifiée une nouvelle fois par l'adjonction de numéros "Bis" et "Ter". Cette même année voit le classement de nouvelles routes en Corse. Plusieurs classements suivront régulièrement jusqu'à la fin de l'Empire.
- Nous noterons également que sous le IInd Empire sont également créés des axes spéciaux qui n'entrent pas dans la nomenclature principale des routes impériales : les routes forestières, le 1er avril 1854, les routes agricoles, le 1er août 1857, les routes thermales, le 8 mai 1860, et les routes salicoles, le 15 août 1867.
- Sous la Troisième République, les nouveaux axes ajoutés à la nomenclature se concentrent le long des frontières de l'Est, de la Méditerranée aux Vosges, avec quelques itinéraires dans le Massif Central. L'essor du tourisme automobile conduit également à la création d'une grande RN202 (Route des Alpes). La nomenclature des routes nationales atteint le numéro 212 le 22 février 1931. Concernant la perte territoriale de l'Alsace-Moselle entre la Guerre de 1870-1871 et la Première Guerre Mondiale, il est à remarquer qu'elle n'a eu aucune incidence sur la numérotation du réseau routier national lorsque ces territoires furent récupérés en 1918.
- En plus des 212 numéros pleins, le tableau des routes nationales comporte de nombreuses routes annexes et d'embranchements numérotés avec des suffixes "Bis" ou "Ter". Vers le début du XXème siècle, certains axes se virent (déjà) adjoindre une lettre "a" après le numéro de la route tandis que les ponts sur le Rhône au-dessous de Lyon reçurent des numéros.
- Au tournant des années 1930, la nomenclature héritée de deux empires et d'un retour à la monarchie présente un aspect homogène car les nouveaux axes ont été intégrés avec intelligence à la classification de départ. A cette époque l'automobile commence à prendre un essor décisif qui nécessite d'adapter en profondeur le réseau routier national. L'ancien réseau est alors densifié par l'ajout de nouvelles routes nationales, héritières directes des routes départementales classées en 1813.